Voici une nouvelle très courte de genre plutôt horrifique:
« Lève-toi »
Elle est là, souriant de son large rictus, la tête penchée vers moi. Elle me regarde avec ses yeux rouges, rouges comme la couleur de la plaie qui m’affecte, là sur la poitrine. Il fait noir, l’obscurité m’oppresse, tel une muselière retenant les crocs d’un chien. Dans le profond reflet de la lune, se répand un bruit. Le silence entrecoupé de longs cris. C’est elle qui me tourmente. Je me lève, doucement, comme un esclave. Je ne vois rien, je suis aveugle et sourd, ici, dans le noir. La peur monte en moi, mon esprit commence à se détraquer, il ne comprend pas, il rejette toute vérité, et pourtant je ne rêve pas, j’assiste à un cauchemar éveillé. Je ne me l’explique pas, j’essaye de fuir désespérement face à Elle, mais je ne peux pas lutter. C’est un combat perdu d'avance, mon destin s’étend devant mes pieds. La lampe s’allume subitement, elle m’éblouit, tel un flash, et je la vois encore, debout avec son grand châle blanc, ses yeux révulsés et sa bouche. Celle-ci est couverte de sang. Puis elle disparaît. Elle veut jouer avec moi, s’amuser. Alors je crie de toutes mes forces :
« Arrête de te cacher ! Montre-toi à moi et qu’on en finisse ! »
La seule réponse est l’écho de ma voix, étouffé à travers la pièce. Le désespoir me force à essayer de m’échapper. Je me précipite sur la porte. La poignée reste bloquée. Je suis perdu. Pourquoi s’en prend-elle à moi ? Je ne suis qu’un modeste journaliste, voulant vivre une vie normale. Ce qu’Elle me fait semble dénué de tout sens. Ou alors, c’est du sadisme. Dans ce cas je suis la victime idéale, célibataire, en dépression. Mais alors elle s’attaque aux faibles ? Oui. Je suis faible. Je ne peux rien faire. Son action est inexorable. Il faut que je me résigne. J’allume la lumière, tout s’éclaire en un instant. Je sens une odeur de brûlé, serait-ce … Non, non le tapis est en train de prendre feu ! Elle apparaît, sournoisement, par derrière, et me dit :
« La rédemption par le feu
-Mais pourquoi, pourquoi me faites-vous ça ?
-Car le mal doit être lavé dans le sang.
-Mais je, je n’ai rien fait. Je suis innocent, je suis innocent. Laissez-moi partir !
-Vous pourrez partir quand il ne restera plus rien de cette maison »
Tout espoir s’envole et elle aussi. Les meubles commencent à brûler. Je vais me consumer avec tout le contenu de la pièce. J’essaye d’arrêter l’incendie sans grand succès. Il semble magique, ensorcelé, il résiste à tout. Je suis réfugié contre la porte, à attendre, pensant sur ma condition et ma vie qui est prête à s’éteindre. J’ai mal aux pieds, je brûle, une torche humaine. J’ai des sensations de chaleur, sur certaines parties de mon corps, je commence à sentir le poulet grillé, je hurle de toute ma voix, de tout mon cœur qui bientôt ne sera qu’un tas de cendres, ce tas de cendres qui ne représentera plus que ma décadence et ma mort.
| Correction de Jack Vessalius
serais-ce -> serait-ce laisser moi -> laissez-moi tout espoir s'envola -> s'envole, texte au présent |