Ordre et désordre :
Bouleversant et antique, le chaos.
L'ordre, nouveauté et tradition.
Ils étaient deux et seulement parce qu'ils étaient, l'un et l'autre pouvait être.
Sans désordre, pas d'ordre.
***
Deux enfants tapis dans l'ombre se dévisageaient.
Théo en tailleur sous la table et Arthur allongé sur le tapis.
Ce salon plein de poussière, à l'odeur d'ombre et d'humidité était leur refuge.
Là, sans aucune lumière ils pouvaient passés des heures dans le silence ou dans les murmures rieurs, la maison abandonnée rayonnait alors à nouveau, retrouvant un peu de vie.
La fenêtre cassée ne pouvait empêcher complètement l'extérieur d'entrer à la rencontre des deux jeunes enfants, des voix d'oiseaux, des bruits occasionnels de voitures, venaient alors les surprendre.
Néanmoins, malgré ces quelques petites interruptions, la pièce était calme et c'est pour cela qu'ils y venaient.
Arthur et Théo étaient deux êtres tranquilles et qui aspiraient à la tranquillité.
Et puisque cet endroit leur fournissait le silence qu'ils aimaient, les deux pouvaient être alors eux-même.
Arthur pouvait se mettre en colère et Théo pouvait se mettre à rire, mais le tout dans une relative discrétion.
Ils venaient d'endroits différents, ils étaient différents et c'est pour ça qu'ils s'appréciaient autant.
Il n'y avait pas que ça bien sûr, il fallait prendre en compte leur gentillesse, politesse, etc...
Mais ce qui les liaient le plus c'était la différence.
Souvent ils se battaient, quand Arthur amenait sa lampe par exemple, ou quand Théo la lançait dehors pour rester à l'abri dans le noir.
Les coups de pieds et coups de poings et coups de têtes fusaient alors en silence. Puis, fatigués, ils arrêtaient de se battre tout doucement et s'allongeaient l'un contre l'autre pour dormir.
Pendant des heures ils pouvait se blottirent ainsi, quelque fois une journée passait.
Soudainement, comme une grande vague balaye un château de sable, les années passèrent.
Le vent était le même, mais les oiseaux ne parlaient plus et la lumière passait à travers la rideau de la chambre blanche de Arthur.
Dans son fauteuil roulant, silencieux, il attendait.
Théo, avait commit un accident et Arthur en avait été la victime.
Paraplégique à vie avait été le diagnostique.
Alors, dans sa grande chambre blanche que Arthur n'avait jamais voulu décoré, des pensées s'agitaient.
Parce que Théo était parti Arthur l'attendait.
Depuis un ou deux ans.
Dans sa grande maison, Arthur réfléchissait à ce qu'il pourrait dire, à quoi il ressemblerait.
Encore et encore il le voyait.
Franchir la porte, casser son monde en blanc, prendre son fauteuil dans ses mains et l'emmener partout ailleurs.
Mais leur maison et leur salon abandonné n'était plus.
Ils ne pourrait plus se battre, se disputer. Est-ce qu'on se bat avec un paraplégique ? Est-ce qu'on l'insulte et insulte sa mère ?
Est-ce qu'on rigole avec un paraplégique ?
Encore et encore, Arthur le voyait, la pitié dans son regard, les pleurs, les excuses de son ami.
Il ne voulait de la pitié de personne, surtout pas de la sienne.
-Merde.
Et puis merde, viens juste me voir. Viens me voir, insulte-moi, plains-moi, enfuis-toi, je m'en fout. Je veux juste te revoir.
De nouveau Arthur repensa à ces années éternelles, où lui et son ami, tapis dans l'ombre, se regardaient, murmuraient, riaient et dormaient.
Un courant d'air souffla, des oiseaux chantèrent, la porte grinça.