On m'a proposé des sujets sur la CB et j'ai fait une nouvelle avec, j'espère que ça vous plaira.
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Les quais ou mes pieds frémissent
Bocal à sujet
Apocalyspe miniaturisée
Un homme rentre cez lui, il y a un piano et une bouteille de whisky. Dehors, il voit un zeppelin. Et pendant un moment il voudrait courir pour le rattraper le zeppelin
Clac
Ses mains larges, couvertes de cicatrices roses comme blanches, enlaçaient un verre de bourbon, une bouteille de whisky l'observait sévèrement, posé sur un piano fermé. C'était un verre qu'il s'était préparé à l'avance, une petite attention de soi qu'il appréciait après son travail. D'un trait brûlant, il avala son liquide de douze ans d'âge, ni la souplesse, ni la subtilité des arômes n'entrèrent en son palais. Il buvait pour se casser la gueule.
Il s'était assit, pas confortablement au fond, mais en bout de chaise, la tête baissé à hauteur de poitrine, le verre au bout des doigts. Ses poumons s'élevaient et redescendaient, par la fenêtre le ciel gris et l'alcool faisait tourniller misérablement ses pensées.
Quelque chose, quelque chose il le savait, allait arriver. Il avait plus qu'à attendre chez lui que ça arrive.
En réponse à cette pensée, un zeppelin glissa sur le gris poisseux des nuages, ses hélices vrombirent près de la fenêtre et la dépassèrent. Attaché en dessous du ballon, deux-trois personne était enfermé dans un conteneur transparent.
Ses jambes se levèrent de son siège bien avant qu'il put y penser, il posa son verre et scruta l'atmosphère. Il devait intervenir, c'était le devoir de la résistance.
Tap, ses pas résonnaient, tap.
Tap
Tap
Mais il était seul.
Tap
Tap
Tap
Il était la résistance, mais depuis bien trop longtemps, il était seul à arpenter cette maison.
Tap
Qu'est-ce qu'il pouvait faire ?
Ses mains attrapèrent le verre délaissé et le remplirent à nouveau.
Non, il ne pensait pas avoir faillit, l'avenir de la résistance en premier.
Ramassis de merde.
Il se cassait la gueule avec du whisky pour abolir la lueur de vérité qui venait mettre ses pieds partout dans sa tête et sur sa fierté. Il avait été... un héros, dirigé une équipe et combattu le roi partout, mais le groupe s'était dissout, la prison, la fatigue, la retraite et la mort avait mit fin à de nombreux parcours héroïques.
Soudain le gris était nuit, dans sa chaise en carton il s'était assommé, un joli K.O qui l'avait séché pendant quelques heures durant. Il passa sa main dans ses cheveux rubis, une teinture difficile à obtenir depuis longtemps.
Scratch scratch
Il regarda la montre qu'il laissait toujours sur la table et qui lui servait d'horloge de maison, les aiguilles tournaient.
Tic
Tac
Et pour lui il était l'heure. Il s'ébroua pour déloger les petits frissons qui s'étaient endormies sur lui. La voiture solaire ne sortirait pas maintenant, simplement parce qu'il n'était pas sûr d'avoir assez de batterie pour un aller-retour la nuit. Heureusement, cela faisait plusieurs mois qu'il s’asseyait sur un billet de train, une faible récompense qui lui venait d'une époque apocryphe où trois personnes habitaient ici.
Tic tac tic
Clac
Il avait tourné le dos à sa porte en espérant revenir, cette fois plus que tous les jours, parce que cette fois, un quelque part où aller lui avait indiqué une direction qui le détournait du regret. Son sac était plein, sa ceinture était prête et il pouvait sentir le poids du billet dans sa poche.
Les milliers d'yeux menaçants brillaient dans tous les recoins, sous la lune, un pelage gris passa sans bruit. Sa main se porta immédiatement à sa bombe de papier, le félin ne l'avait pas remarqué, il était accroupis derrière un mur, le chat le dominant de plusieurs centimètres. Ses sens acérés au maximum par le danger, pénétraient dans la peau et de plus en plus d'aiguilles s'enfonçaient au plus loin dans son dos et sous son crâne, de la sueur perlait sur le front lisse de l'homme.
Sans un bruit encore, la créature s'éloignait.
Sa bombe de papier remplie de vinaigre aurait sans doute put faire fuir l'animal, si le chat ne lui avait pas sauté dessus par derrière, dans ce genre de circonstance personne ne survivait sans aide. Il avait expérimenté les griffes de ces monstres de l'évolution avant qu'on ne soucie de qui du roi ou de la résistance. La période du trouble, après la chute du gouvernement et avant l'instauration d'une pseudo-royauté, était une anarchie de rats, de chats et autres ennemis de l'humanité qui faisait maintenant leur taille.
La nuit étouffante se continua sans autre trace de bête poilue, l'essence de la rivière prit la place sur les odeurs de la ville. Lorsqu'il emprunta le pont goudronné, en contrebas, il aperçu tout une procession de navires portants des toiles de tentes et des maisons en plastique ou en bois. Toutes les deux embarcations une plateforme flottante, ou une barque remplie de terre et de plantes, glissait tiré par une maison. Seul le bruit de l'eau sans éclat revenait aux oreilles, sans la lune, nul ne les aurait aperçu.
La cité flottante s'étendait plus loin qu'il ne pouvait voir et il aurait apprécié continuer son observation, mais le tic tac de son esprit lui rappela qu'il était attendu.
Tap tap tap
Il descendit sur les rails de trains qui ne convenaient plus, le nouveau n'utilisait qu'une seule des poutre d'acier, mais allait tout de même convenablement vite malgré sa taille incomparablement moindre.
Fuuuuuuh Fuhhhhhhh
Le sifflet de fumée avait retentit, le train arrivait en gare.
Criiiih
Les freins crissèrent un instant avant l'arrêt total.
-En voiture ! Vous là ! En voiture, si vous avez un billet ! hurla le conducteur.
Clac
Tout comme à l'extérieur, le train répliquait parfaitement les vieilles locomotives, tout y était feutré et les couleurs étaient clairs, des lumières électriques teintaient la nuit d'un peu de lumière assombrissante.
Tchachachac
Le train se remettait en route, l'homme passa sa main dans ses cheveux pour se donner contenance, il épousseta un peu sa veste grenat et resserra sa cravate. L'atmosphère qui se dégageait d'ici était trop posh pour lui.
Tap tap
Un contrôleur, avec une casquette noire et l'habit qui allait avec fit, un petit signe à l'homme en rouge.
-Bienvenue, vous êtes sur le Birchwood, pourrais-je voir votre billet et vous indiquer un siège approprié ?
-Heu... bien sûr. Voilà.
-Ah ? une surprise ravie surlignait le visage du contrôleur, vous êtes en première classe. J'aimerais bien vous dire qu'il n'y a que des premières classes à bord de ce train, mais je me dois de vous conduire à la voiture approprié, c'est un petit compartiment, très privé, très calme. Je dois vous avouer que la décoration n'y est pas d'aussi bon goût que dans les autres voitures selon mon humble opinion.
Clac
-Première classe. Vous y êtes. Installez-vous, je vous en prie, un rafraîchissement vous sera servi plus tard. A bientôt.
Le contrôleur repassa dans la voiture d'où ils étaient venu. Le décor était très frimeux en effet, du doré et de la soie avec des fauteuils en peau de velours de Carme.
Tap
Il fit quelques pas, l'ambiance velouté commençait à s'immiscer en lui, du parfum avait semble-il été diffusé.
-Tu ne viens pas t'asseoir à côté de moi, Lych ? lança une voix grise.
-Ciem.
-Toujours dans la révolution ?
Pendant un instant, après s'être assit au côté de l'homme au costume gris, Lych contempla le visage salé par la pluie marine et qui commençait à prendre les marques du temps. Sa main s'approcha tout doucement de ces traits peints à l'eau de mer et l'homme rouge sentit son amertume fendre ses lèvres.
-Je sais pas, toujours roi ? souffla Lych.
-J'ai même pas de couronne, je suis juste une ruine d'épave. Tu l'as dis au moins à tes nouvelles recrues de la résistance que j'étais pas si méchant que ça ?
-Y a plus personne avec moi maintenant. Y a eu des mort et des captures, des départs à la retraite aussi...
-Oh.
-Et des gens qui ont traversés la frontière.
-C'est qu'une mauvaise passe, je sais que tu vas retrouver des camarades à un moment ou un autre, et puis on travaille toujours ensemble, non ? Je peux faciliter des évasions. Écoute je voulais te dire quelque chose d'important sinon...
-Arrête de faire le con, Ciem. Y a six mois ç'aurait été une erreur de parcourt, un moment d'égarement, mais ce que tu as fais récemment tu peux pas le justifié en faisant beau visage. Tu n'es pas qu'une marionnette sans pouvoir, tu en as et tu en abuses. Tu ne pourras pas mettre tout ça sur le dos des Actionnaires.
-Attention avec les mots, Lych. Je ne comptais pas nier si tu m'avais demandé. J'ai utilisé mon pouvoir pour atteindre mes fins personnels, c'est totalement vrai. Mais même si je n'aime pas me trouver des excuses, il y avait une raison derrière tout ça.
-C'était une purge !
-Ahhh... Tu es toujours dans l'émotionnel à outrance. C'était nécessaire.
-C'était nécess... ? On parle de dizaines... de centaines de morts !
-Je vois que t'as décidé qu'on serait sincère, alors je vais l'être aussi. Lych, écoute-moi bien bordel, je me torche le cul avec la rubrique nécrologique de ces gens ! T'entends ? Ils sont morts ? Putain, mais qui ? Qui en a quelque chose à foutre ? Ils sont morts et le monde n'a pas implosé, parce que les morts ça se trouve par milliards. Ils étaient sans importances, j'ai gardé les ingénieurs. Ils me refusaient leur aide, aussi bien au nom du roi que de la résistance. Il me fallait l'hélium et de quoi construire les aéronefs. Parce que figure-toi que notre projet on est à deux doigts de le réaliser. Et pourquoi ça ? Parce que je me suis sali les mains ! Regarde bien ! Ce sont des mains sales, qui ont étranglés et étripés pour arracher la clé mécanique que ces salopards m'avaient refusé !
-Tu es fou...
-ALORS JE SUIS FOU ? Putain, putain, putain. Putain putain putain putain de MERDE ! Oui, je suis fou ! T'es content ? Et toi, t'aurais osé plongé dedans cette folie pour atteindre notre rêve ? Tu préfères attendre, comme toujours, que les choses arrives. Voilà. La prochaine fois fais mieux ton travail de résistant, parce que des choses sont arrivés, des choses sales que j'aurais aimé pas avoir eu à faire. Et je m'en fous Lych, t'as pas le droit de me juger, parce que tu savais que je le ferais et que t'as rien fait pour m'en empêcher ! Tu as préféré respecter leur isolement ! Et maintenant ils sont morts, je les ai tué ! Est-ce que c'est mieux, maintenant ?
-Tu peux pas me mettre ça sur le dos !
-Ce que tu n'as pas fais équivaut à ce que j'ai fais, ma conséquence découle de ta cause, Lych !
-...
Lych détourna ses yeux pour regarder fixement devant lui au loin, quelque part où il n'était pas.
Jusqu'à ce que le contrôleur revienne avec un chariot, le silence vexé resta fermement intacte et même après son passage, les deux burent leur verre en silence.
-Lych...
-...
-Tu regrettes pas avant ?
-...
-Quand je jouais du piano et que tu dansais, avant qu'on se retrouve tous comme ça.
-J'avais commencé à regretter bien avant.
-Je suis désolé, Lych.
-Pourquoi ? C'est moi qui suis parti du groupe pour ma copine.
-Ouais, la voix de Ciem de s'était cassé. C'est vrai, ouais.
-C'est moi qui suis désolé.
-T'en penses pas un mot, t'étais trop occupé à être heureux avec elle pour regretter.
-...
-Mais c'est pas grave, j'aurais fait pareil.
-Non... t'aurais jamais fait ça. Et devine ? C'est pour ça que je m'en veux.
Ils n'ouvrirent plus la bouche pendant de longs moments à nouveau, mais les yeux de nuage mélancolique de Ciem flottèrent longtemps entre la grande main de son ami et la sienne, aux doigts fins et courts.
Criiiiiic
-Port-Royal, je descend là.
-A plus, Lych. J'espère que la prochaine fois on s'engueulera pas comme ça. Bonne chance là où tu vas.
Tap tap tap
La ville était comme à son habitude, le seul port encore en activité sur le territoire, mais complètement vide la nuit. Les canaux empruntaient au ciel la voie lactée, mais les lampadaires dormaient depuis que l'électricité s'était raréfié. Avant, l'été, sous l'orange des lumières, il venait chaque année. Lych, Ciem et Tiffany, un trio d'artistes de rue qui venait vivoter de l'argent des touristes en été.
Ciem jouait du piano, mais dans la rue il grattait un peu de guitare, Tiffany chantait et Lych dansait. Et tous les soirs, après leurs représentations, ils se buvaient quelque chose à une terrasse de café.
***
-Lych, tu regrettes pas quand tu étais en duo avec Ciem ? Il paraît que vous aviez du succès, enfin, vous remplissiez les salles, quoi.
-Non, pas du tout. Pourquoi tu dis ça ?
-Je me sens un peu responsable, on s'est mis ensemble, puis on formé un groupe et on est parti comme ça sur un coup de tête à cause de mon idée. Je pensais que ce serait cool de vivre comme des artistes, libre et sans attache, tu vois ?
-Je t'ai suivi et Ciem a suivi parce qu'on pensait pareil et on a pas eu tort, y a des moments difficiles, mais on s'en sort bien, non ?
-Ouais, tu as raison. Merci.
-De rien.
***
A l'horizon, un bateau gigantesque attendait pendant qu'un petit motorisé approchait.
Tap tap
Lych s'avança des deux hommes qui venaient de désembarquer, deux hommes d'une taille de Gulliver, un en chemise décontracté et l'autre en costume.
-Monsieur Nitis, enfin nous nous rencontrons, s'écria l'homme. Nous allons pouvoir conclure cette affaire, je suis désolé de vous presser, mais j'ai tous les autres Petits Actionnaires à voir.
-Vous acceptez nos demandes ? répondit Lych.
-Bien sûr, une démocratie. Le contrat a été dûment acté, mais vous ne voulez pas d'argent ou quelque chose de plus ? Votre petite faveur ne me coûtera rien de toute façon. Peut-être voulez-vous que je m'arrange pour aider votre ami le roi ?
-Non, je n'en vois pas l'intérêt.
-Ah, je n'ai jamais respecté les gens qui laissaient tomber leurs amis, mais puisqu'on ne va plus jamais se voir, je suppose que je m'en fiche.
-Tenez, répondit froidement Lych.
-Merci bien. Allons-voir les autres.
Blam blam
Trois véhicules miniatures armés de petits calibres étaient sortis du coin de la rue.
-Lych Nitis, trompeta une des voitures, rendez-vous! Vous avez trahis la résistance et le pays entier !
De surprise il fit un pas en arrière, son cœur battait dans ses tempes.
Boum boum
-Vous collaborez avec des Actionnaires et mettez en danger l'intégrité du pays ! Vous collaborez à une OPA hostile !
Boubouboum
Sa mâchoire bougea, mais aucun mot ne put sortir de ses lèvres.
L'Actionnaire était déjà parti bien loin.
-Monsieur, murmura le garde du corps en costume, dois-je intervenir ?
-Est-ce qu'ils nous menacent ?
-Non, je ne crois pas.
-Personne ne voudrait prendre le risque de blesser un Actionnaire majoritaire, imagine les représailles.
Bouboubboum
Finalement...
-Je l'ai fait pour la démocratie ! POUR NOTRE PUTAIN DE COMBAT DE
***
Par terre une veste de costume grise gisait, une cravate et une montre à son côté. Dans le clairombre, un homme enlaçait une mélodie à la peau ivoire et aux cheveux ébènes, faisant jouer ses doigts comme un ruisseau sur un lit sans drap. Il déboutonna encore un peu sa chemise, laissant voir sa clavicule naissante et une peau blanche grisante, alors qu'il accélérait de plus en plus.
Il alluma une cigarette et alla s'asseoir ailleurs pour observer de loin son piano et sa bouteille de whisky. L'obscur avait fini par envahir toute la pièce, l'homme regarda entre ses doigts le scintillement rougissant et mortel de sa sèche. Il savait que ça lui faisait pas du bien, mais il ne pouvait pas arrêter.
Après sa deuxième, il ouvrit la fenêtre, de la fraîcheur entra. Pendant quelques instants il clopa à la fenêtre les yeux ailleurs et alla se rasseoir pour attendre. Il n'était pas attendu, on ne viendrait pas le voir, mais lui patientait. Il détestait ça parce qu'il commençait à regretter, il se rappelait qu'il n'était pas voulu et pas utile. Il avait dû faire des concessions inacceptables et tout ça par faiblesse, par peur.
Il attendait car il avait besoin de quelque chose qu'il n'avait jamais vraiment eu, parce qu'il avait trop donné pour partir.
Il attendait ce soir, parce qu'on avait quelque chose à lui dire.